La mission de Pôle Emploi passée au crible d’une expérience ratée

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Tentative de remise en question générale à travers le prisme particulier d’une expérience ratée.

Il y a peu, j’étais convoquée chez Pôle Emploi pour effectuer mon inscription officielle aux côtés de ma conseillère. C’est guillerette que je me rendais à mon rendez-vous ce matin-là, espérant innocemment reprendre le premier rôle de Libre et Assoupi. Oui vous savez, ce jeune poète qui n’aspire qu’aux plaisirs de la vie et dont le conseiller Pôle Emploi, séduit par tant de légèreté, devient son meilleur complice de l’oisiveté. Non pas que je ne cherche pas à travailler, mais mon parcours universitaire un peu « multiple » exige un peu de temps pour passer dans la partie étroite de l’entonnoir. J’avais juste besoin d’une conseillère à l’écoute et qui soit de bon conseil.

Sauf que… Je suis tombée sur une conseillère qui, soit m’a détestée à la minute où elle m’a vue, soit a réalisé qu’elle ne pourrait pas m’aider de toute façon et a préféré me le montrer avec aigreur voire méchanceté, soit est totalement incompétente.

La première fois, ça fait toujours un peu mal

C’est simple, voici l’une des missions principales de Pôle Emploi : accueillir, informer, orienter et accompagner. Point par point, je vais montrer à quel point cette mission n’a pas été remplie dans mon cas.

Merci de nous raconter en commentaire ou via notre adresse mail vos propres expériences (ratées ET réussies, bien sûr).

Accueillir

J’ai certes été accueillie.

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Informer

Là, c’est plus compliqué. Poser des questions « techniques » m’a valu un regard effaré et des réponses acides. À tel point que, n’ayant pas lu la mission de Pôle Emploi avant de m’y rendre, et n’étant donc pas armée de la certitude que j’étais en droit de réclamer des informations auprès de ma conseillère, j’ai cru que mes questions représentaient un acte impardonnable. Le pire, c’est qu’en me renseignant suite à ce rendez-vous, je me suis également rendue compte que ma conseillère m’a donné de fausses informations (en connaissance de cause ou pas, je ne sais pas) .

  • À la question « Pourquoi vous inscrivez-vous à Pôle Emploi alors que vous cherchez déjà du travail seule ? », je réponds que c’est pour une question de statut (à la sécurité sociale par exemple).

Elle affirme que cela n’a rien à voir DU TOUT. Or, n’étant plus étudiante et n’étant ni salariée, ni auto-entrepreneuse, ni rien, que suis-je alors si je ne suis pas demandeuse d’emploi ? Certes, le statut d’étudiant peut être prolongé pendant un an après la fin des études, mais cela ne me concerne pas (et de toute façon, elle n’a même pas cherché à savoir quand j’avais terminé mes études). Quoi qu’il en soit, elle n’a pas souhaité me répondre. Alors pour l’aider pour la prochaine fois, je l’invite à lire cette page.

  • Quand je demande si le fait d’avoir deux adresses (l’une, officieuse, à Paris pour chercher du travail ; l’autre, officielle, dans ma ville d’origine où je suis domiciliée pour la CAF) pose problème pour toucher le RSA :

C’est la question de trop. Ignare, je me prends les foudres de ma conseillère, qui me crie que cela n’a rien à voir, qu’elle ne travaille pas à la CAF, et que si mon adresse à Paris est fausse et que les courriers du Pôle Emploi lui sont renvoyés, je serai immédiatement radiée.

Percevant qu’elle n’avait pas compris ma question, je clarifie et répète. Là, je reçois cette remarque acerbe (texto) : « non mais attendez, vous comprenez c’que j’vous dis ? Vous répétez ce que j’ai dit s’il-vous-plaît ? Parce que vous me faites peur là… » Elle pouffe et ajoute « Il n’y a AUCUN RAPPORT entre le Pôle Emploi et la CAF » .

Je comprends donc que je suis débile et me tais poliment. Or, le lendemain tout juste, je reçois un courrier de la CAF confirmant mon nouveau statut (au chômage) et m’annonçant qu’ils PRENDRAIENT CONTACT AVEC PÔLE EMPLOI POUR ÉVALUER MON DROIT AU RSA. CQFD.

J’ajoute que suite à ces deux questions, elle me dit sur un ton moqueur : « vous voulez être journaliste, non ? Vous êtes quand même censée savoir vous renseigner et faire des enquêtes !». Et si on parlait de ce qu’est censé savoir faire un conseiller Pôle Emploi ?

Inutile de dire que la mission « informer » n’a pas été remplie. 


Orienter

Vaste programme. Comme beaucoup de gens dans mon cas, je n’attends pas après Pôle Emploi pour trouver du travail. Cela dit, je me rends au rendez-vous l’esprit ouvert à tout commentaire constructif, à tout conseil judicieux sur mes démarches futures. J’ai eu droit à un commentaire et à un « conseil », mais je ne sais pas quoi en faire.

  • « Les jeunes de votre âge mettent des hashtags dans leur CV. »

À la vue de mon CV, où mes postes passés apparaissent clairement, en titre, en gras, en jaune, elle me demande : « mais vous avez fait quoi exactement ?« . Je réponds bêtement que j’ai fait exactement ce qui apparaît en titre, en gras, en jaune sur mon CV. Et là, moment mémorable : « Écoutez, les jeunes de votre âge mettent des mots-clés en hashtag sur leur CV, c’est comme ça que ça marche de nos jours. Vous comprenez ?».

  • « Les jeunes d’aujourd’hui, vous vous attachez à un modèle du passé qui n’est plus. »

En effet, je cherche du travail. Pour vivre et manger sans être aux crochets de mes parents. Quelle idée ! Oui ma grande, les jeunes d’aujourd’hui se lancent à leur compte, et les success stories ne manquent pas ! Lancez-donc votre magazine à plein temps. Le journalisme, tout le monde veut faire ça et il n’y a pas de travail de toute façon. Certes, un jour, PÉNIBLES sera un géant de la presse et aura racheté Apple, Microsoft et Burger King, mais en attendant, en tant que jeune femme de la vieille école, il me faut du travail.

Inutile de dire que la mission « Orienter » n’a pas été remplie.

Accompagner

Certes, je risque d’avoir d’autres rendez-vous d’ « accompagnement » (sauf si elle lit cet article). Mais je n’ai même pas été accompagnée à la porte.

Mon cas particulier n’est, je l’espère, pas général : tentatives de nuance

Je suis bien consciente du fait que mon cas n’est pas général, bien que beaucoup de gens de mon entourage semblent avoir eu les mêmes sentiments à la sortie de leurs rendez-vous avec leurs conseillers Pôle Emploi.

Je suis bien consciente également de l’inadéquation entre mon profil et mes objectifs professionnels d’une part, et les offres auxquelles Pôle Emploi peut me donner accès, d’autre part. Ce n’est pas pour trouver du travail que je me suis inscrite chez Pôle Emploi, encore une fois, et ma conseillère devait bien s’en douter. Mais la moindre des choses est d’offrir un service poli et franc. Si ma conseillère m’avait dit « bon, on sait toutes les deux que vous ne trouverez pas grâce à nous, mais remplissons cette sacrée paperasse et essayons de discuter un peu», je n’aurais pas écrit cet article.

Je suis bien consciente aussi du manque de moyens dont souffre cette institution et par conséquent des dysfonctionnements entre des objectifs établis « en haut », au sein de la hiérarchie, et des expériences de terrain qui n’entrent pas forcément dans les cases pré-établies.

Cette situation apparaît très clairement à travers Pôle Emploi, ne quittez pas !, documentaire réalisé par Nora Philippe suite à trois mois d’immersion au sein d’une agence francilienne. Il est forcément délicat de jouer le rôle d’intermédiaire entre une direction qui fixe des objectifs difficiles à atteindre dans la conjoncture actuelle et des demandeurs d’emploi lassés et agacés.

Tout comme le contrôleur de la SNCF qui prend sur lui toutes les insultes liées à un énième retard de train, ou le serveur qui reçoit les foudres du client qui n’aime pas les oignons dans sa quiche lorraine, le conseiller Pôle Emploi, en première ligne, sert de punching ball. Les réactions suscitées par le documentaire de Nora Philippe sont d’ailleurs très révélatrices.

Dans une interview accordée au magazine Challenges, elle dit : « Certaines associations militantes de chômeurs ont trouvé que mon film humanisait par trop ces bureaucrates qui malmènent les chômeurs… Tandis qu’à la direction de Pôle emploi, ils estiment qu’il faudrait plutôt étouffer le film.»

Si les agents du Pôle Emploi reconnaissent les problèmes et tentent d’y apporter des solutions, d’abord en personnalisant au maximum leur relation aux demandeurs d’emploi, ils sont forcés de constater que le système de fonctionnement de leur institution ne le permet pas.

À qui la faute ? Je n’ai pas de réponse, mais j’ose avancer, de manière un peu naïve et idéaliste peut-être, qu’avec politesse et franchise on avance toujours mieux.

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PÉNIBLES

5 Comments

  1. Hello !
    Première fois que je tombe sur votre site (ah, les réseaux sociaux quelle merveille) , mais j’y retournerai surement, pour la plume 🙂
    Ca, c’est dit.

    Alors, vous demandez nos expériences, voici la mienne.
    La première fois, je suis tombée sur la version masculine de la votre, à peu de chose près. Il ne répondait pas à mes questions administratives, me proposait limite de devenir en deux-deux carreleuse en Auvergne. J’ai rien contre les carreleurs ou l’Auvergne, mais on ne pourrait pas être plus loin de mon parcours.
    Il me dit qu’il me manque des papiers pour mon dossier. Je lui dit (après recherches au préalable) qu’il n’y en a pas besoin. Il me dit que kicéki s’y connait ici, c’est moi ou c’est lui ? (A ce stade j’ai surement pas besoin de préciser que ces papiers, j’en ai finalement jamais eu besoin)

    Je retrouve un emploi toute seule pour quelques temps, puis pars une longue période à l’étranger faire du volontariat, je reviens, et hop, je repasse par Pole Emploi.
    Je suis paumée, pas sûre de savoir ce que je veux faire, ce que je sais faire, ce que je vais faire de moi, de ma vie et de mon chat.

    La première fois, je tombe sur un conseiller de la même trempe. Je lui sors le blabla habituel, « je cherche assidument et je suis tellement heureuse dans ma vie, à la prochaine bisous », pas la peine de commencer quelque dialogue avec lui.
    Après une question par mail de ma part sur les différents noms de contrat, il me répond et finit son mail en me disant qu’il ne sera plus mon conseiller, sans préciser la raison, mais bon, c’est pas comme si ça m’intéressait de toute façon.
    « Et allez, c’est reparti », que je me dis à la convocation suivante.
    Et là je tombe sur une toute petite dame qui en moins de dix minutes se rend compte qu’il y a quelque chose qui cloche dans mon discours, et me demande si CA VA. Et non ca va pas. Je pleure, elle me parle de solutions qui n’ont rien à voir avec le monde du travail, elle me parle de ce qui l’a aidée elle dans sa vie, elle me demande si j’ai des gens pour parler, si avec ma famille ca va, elle me donne son nom complet, son mail. Je reste une heure dans son bureau, à coup de mouchoirs et de verres d’eau, avec elle qui me dit que c’est normal, qu’il n’y a pas de soucis, que ça va.
    A la fin du rendez-vous elle ne me donne pas les habituelles trois annonces trouvées à la va-vite, elle me dit de me poser avec moi même et qu’on verra ça la prochaine fois, de chercher quand je peux et si je peux sans oublier de m’actualiser, mais pour le reste on verra.
    Au rendez-vous suivant, elle me demande comment ca va, personnellement d’abord, puis professionnellement. Et elle me présente un de ses collègues spécialisé dans les dossiers de jeunes dans le même cas que moi, avec un programme financé à l’échelle européenne ( suivi musclé et accompagnement personnel), auquel je décide de m’intégrer.
    Depuis c’est discussions personnelles et professionnelles sans jugement, aide sur les outils de pôle emploi (certains dont je n’aurais même pas soupçonné l’existence) , contact par mail direct si besoin, etc.

    Donc, ILS SONT LA, ILS EXISTENT. Le problème c’est qu’on ne devrait pas avoir à y repasser plusieurs fois (comme moi) pour avoir l’espoir de trouver un bon conseiller. Enfin, « bon »… »Correct » déjà ce serait sympa. Pour ma part j’ai eu des mauvais et des très bons.
    Et ça m’ennuie d’avoir une mauvaise image des conseillers, d’autant plus qu’un ami de la famille l’est dans une autre région que la mienne, et je le vois répondre à des mails et même des appels de personnes dont il est en charge du dossier même en soirée ou week-end. Comme je le connais, il doit vraiment faire de son mieux.
    Mais entre les outils informatiques de Pole Emploi plus qu’approximatifs ( exemple : un jour j’étais au téléphone avec mon ami conseiller d’une autre région, donc, et il voyait des offres que je ne voyais pas, je voyais des offres que lui ne voyait plus car plus besoin de personne, bref..) et les conseillers qui n’ont pas/plus envie, c’est clairement….la merde.
    Et de l’autre côté oui évidemment, ils tombent sur des gens exécrables, impolis, fraudeurs, tout ce qu’on veut.
    La faute est à tout le monde, à personne, à l’état, à la situation économique, à Obama. THANKS OBAMA. DAMMIT OBAMA. (quoi c’est pas lui qu’il faut accuser tout le temps maintenant ? me serais-je fourvoyée)

    Voilà voilà, c’était ma petite participation, mon petit retour, ma petite voix.
    Je ne doute pas que ça vous ait plu 😎 aha.

    A la prochaine, la bise !

    • En voila un SUPER témoignage positif ! J’en attendais secrètement, au moins un ! Évidemment que les bons conseillers existent et que mon article n’est pas une généralité comme je l’ai précisé. Heureusement. Peut être aurais-je un tout autre discours après mon prochain rendez-vous… C’est tout le mal que je me (nous/vous/leur) souhaite !
      Merci encore pour ce retour détaillé !

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